Mar07162024

mise a jour :Dim, 20 Aoû 2023 9pm

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Pourquoi deux hadîths contradictoires ont-ils pu être rapportés?

Pourquoi deux hadîths contradictoires ont-ils pu être rapportés?



Citons des hadîths forgés à l'époque de Mu'âwiyah et considérés depuis comme des traditions prophétiques: «N'écrivez rien à partir de moi: à part le Coran effacez ce que vous avez écrit».(315)

D'autres récits vont dans le même sens: ils ont demandé au Prophète (SAW) la permission d'écrire à partir de lui mais il ne l'autorisa point.(316)

Abû Hurayrah raconte:

«Nous étions assis, en train d'écrire ce que nous avons entendu du Prophète (SAW). Soudain il sortit et nous demanda:

- Qu'est ce vous écrivez?

- Ce que nous entendons de toi, répondîmes-nous.

- Un livre à côté du Livre d'Allah?, nous demanda-t-il?

- Quoi?

- Ecrivez le Livre d'Allah; seul le Livre d'Allah. Pas de livre à côté du Livre d'Allah!, ordonna-t-il.

 

Nous avons alors ramassé ce que nous avions écrit puis nous l'avons brûlé».(317)

Que resterait-il alors des lois islamiques si nous brûlions les traditions prophétiques ou les jetons dans la mer? Non. Le Prophète (SAW) n'a sûrement pas proféré de tels hadîths. Voici ce qu'il a dit à Minan lors du pèlerinage d'Adieu:

«Qu'Allah rende prospère tout serviteur qui, après avoir entendu et compris mes propos, les a transmis à quelqu'un qui ne les a pas entendus car il se peut qu'on porte du fiqh à quelqu'un qui en saura davantage que soi-même». Dans une autre version, le Prophète (SAW) dit: «Que la personne présente (ici) transmette (cela) à celle qui est absente. Car il se peut qu'on transmette une science à quelqu'un qui en aura une meilleure conception».(318)

Le Prophète (SAW) dit aussi:

- Qu'Allah fasse grâce à mes Califes (deux fois)

- Qui sont tes Califes, Ô Messager d'Allah?, lui demanda-t-on.

- Ce sont ceux qui après moi rapportèrent mon hadîth et ma sunnah.(319)

Dans le recueil d'Al Bukhârî (chap.: "L'écriture du savoir"), un homme du Yaman a entendu des propos du Messager d'Allah et demanda qu'on les lui note. «Ecrivez-lui (le hadîth)», ordonna le Prophète.(320)

De même un homme d'al-Ançar avait l'habitude de s'asseoir près du Prophète. Mais il avait beau entendre des hadîths et les apprécier, il n'en retenait rien. Quand il s'en est plaint au Prophète (SAW), celui-ci lui dit: «Aide-toi de ta main droite», en lui montrant qu'il s'agissait d'écrire.(321)

'Amru b. Shu'ayb rapporte ce récit à partir de son père citant son grand-père:

- Ô Messager d'Allah! Puis-je écrire tout ce que j'entends de toi?

- Oui, répondit-il.

- En cas d'agrément comme en cas de colère?, redemandai-je.

- Oui, affirma-t-il. Car en tout état de cause je ne dis que vrai.(322)

Le récit rapporté par 'Abdullah b. Amru b. al-'As est similaire (voir note 8). Selon un autre récit du 'Amru b. Shu'ayb précédent: «Ô Messager d'Allah! Nous entendons des hadîths mais nous ne parvenons pas à tout apprendre; pouvons-nous les écrire?» «Oui, répondit-il, écrivez-les».(323)

Le Messager (SAW) a donc bel et bien, ordonné d'écrire ses hadîths de les compiler et de les diffuser comme l'affirment les récits précédents. Pourquoi donc a-t-on rapporté des hadîths qui affirment le contraire?

La réponse est que Quraïsh (les Muhâjirîne parmi les Compagnons) empêchait l'écriture du hadîth du vivant même du Prophète. C'était elle aussi qui empêcha l'écriture du testament du Prophète juste avant sa mort. Le deuxième calife consacre cette prohibition, brûla des hadîths écrits, empêcha de diffuser la sunnah et emprisonna à Médine les Compagnons qui s'y sont opposés. Le troisième calife emboîta le pas à son prédécesseur. Il était normal que certains compagnons se soumettaient aux volontés du pouvoir. D'autres n'hésitaient pas à s'y opposer et à diffuser coûte que coûte les hadîths du Messager. Abû Dhar subit à cause de cette orientation des épreuves dures et douloureuses. Nous montrerons plus tard que l'Imam 'Ali (a. s.) encouragerait cette prise de position avant son investiture populaire comme 4e calife. Une fois au pouvoir, il était normal qu'il uvrait pour la diffusion du hadîth mais après sa mort et la prise du pouvoir par Mu'âwiyah, celui-ci trouva, au début, des difficultés à empêcher l'écriture du hadith prophétique. Pour y parvenir, il fallait trouver des assistants et des rapporteurs de récits prohibitifs. D'où cette contradiction flagrante entre les hadîths selon lesquels le Messager (SAW) dit: «Ecrivez mon hadîth» et ceux qui disent: «N'écrivez pas mon hadîth». C'est pour cela que nous disons: chaque fois qu'on se trouve devant des hadîths contradictoires, il convient de rejeter ce qui était conforme aux orientations du pouvoir régnant (à travers les époques).

Rappelons aussi que la prohibition de l'écriture des hadîths avait pour but d'empêcher la diffusion des mérites de l'Imam 'Ali (a. s.) parmi les Musulmans, surtout à l'époque de Mu'âwiyah qui ordonna de maudire l'Imam dans les sermons du vendredi sur les chaires musulmanes.

Mu'âwiyah avait aussi besoin de changer la conception islamique générale relativement aux qualités exceptionnelles que devait avoir l'Imam des Musulmans. Pour ceux-ci, le premier dirigeant islamique, le Prophète (SAW) était le modèle de la perfection humaine et infaillible. Cette conception ne plaisait pas à Mu'âwiyah parce qu'elle empêchait les gens vertueux de le suivre et d'accepter son fils Yazîd, un ivrogne et un pervers avéré, comme héritier du califat. Il fallait donc, pour lui, que l'idéal des Musulmans - Le Messager d'Allah (SAW) - se métamorphosât aux yeux des gens. D'où l'apparition, à cette époque, de hadîths montrant le Prophète (SAW) à un niveau aussi bas que celui de Yazîd et de Mu'âwiyah. Ces pseudo-hadîths furent rapportés par certaines mères des croyants et certains compagnons.

Comme les récits israélites allaient dans le même sens (le dénigrement des prophètes anciens (a. s.)), Mu'âwiyah encourageait leur diffusion parmi les Musulmans. La sunnah véritable n'étant rapporté à cette époque que de mémoire et la prohibition de l'écrire et de la diffuser étant de vigueur, les récits hébraïques s'entre mêlaient aux hadîths du Messager (SAW) au sein de l'Ecole des califes. Par après cette pensée islamique modelée à l'époque de Mu'âwiyah allait devenir l'Islam officiel. Tout ce qui s'y opposait était refusé et banni. Quand le petit-fils du Messager d'Allah (SAW), Al- Hussayn et Ahlul-Bayt (a. s) avec lui eurent mis fin, par leur martyre, à la déviation et à l'auréole fabriquée que s'était donnée le califat, le pouvoir politique se distingua alors de la véritable représentation dans la Communauté islamique.

C'était donc l'attitude de l'Ecole des califes à l'égard des hadîths prophétiques. Reste à étudier l'attitude opposée, celle de l'Ecole d'Ahlu-Bayt (a. s). Mais, avant de le faire, complétons la recherche dans ce chapitre par l'évocation de la principale conséquence de la prohibition par l'Ecole des califes d'écrire et de diffuser la sunnah du Prophète (SAW): le recours à l'élaboration personnelle des lois et à la mise en application des opinions des jurisconsultes. Parfois ceux-ci se permettaient de légiférer en opposition à la sunna du Messager (SAW). (L'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s) avait bien sûr une autre position bien différente).

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