Mar07162024

mise a jour :Dim, 20 Aoû 2023 9pm

Back Vous êtes ici : Accueil Bibliothèque Les Compagnons Bilâl D'afrique L'événement (La Réunion) De Saqîfah

L'événement (La Réunion) De Saqîfah

L'événement (La Réunion) De Saqîfah


Ce jour-là quelques compagnons appartenant à la tribu de Aws amenèrent Sa'd Ibn 'Obâdah al-Ançârî, un homme très âgé, à Saqîfah et portèrent sa candidature au Califat au nom des Ançâr (les Partisans).

D'autre part, lorsque quelques membres de la tribu de Khazraj vinrent à apprendre qu'un conseil avait été formé à Saqîfah pour choisir un successeur au Saint Prophète, ils accoururent vers ce lieu.

On dit que quelques personnes particulières avaient été intentionnellement invitées à cette réunion dans un but précis. Dans cette réunion chaque participant parlait pour son propre intérêt et désirait soit qu'il fût lui-même Calife, soit qu'une personne qu'il soutenait le devienne. Les uns disaient que les Ançâr avaient un droit prioritaire au Califat et que le Calife devrait être choisi parmi eux, parce qu'ils avaient accueilli le Saint Prophète et les autres Emigrants dans leur ville et qu'ils leur avaient fourni toute l'aide nécessaire.

D'autres objectaient que le Califat devait revenir aux Emigrants parce qu'ils avaient abandonné leurs maisons pour la cause de l'Islam. Tout indique que les jeux ont été faits avant la réunion, laquelle n'a été qu'un simulacre d'élection.

L'un des Partisans (Ançâr) dit: «Le Calife doit être choisi parmi les Quraych, car si le sacrifice est le critère du mérite du Califat, qui pourrait y avoir titre plus que l'Imam 'Alî».

L'un des participants était irrité par l'évocation du nom de l'Imam 'Alî et dit sèchement à l'intervenant: «Silence!».

 

Les cris et les huées prévalaient dans la réunion. Chaque groupe s'opposait à l'autre et le critiquait. Les objections fusaient de partout. Entre-temps, Abû Bakr interrompit tout le monde et dit: «A mon avis le Califat doit être confié aux Emigrants et je considère que Abû 'Obaydah et 'Omar (Ibn al-Khattâb) conviennent parfaitement à ce poste. Je suis prêt d'ores et déjà à faire serment d'allégeance à l'un d'entre eux».

'Omar qui attendait cette opportunité rassembla son courage et dit: «J'ai entendu le Saint Prophète dire que les dirigeants de la religion seraient issus des Quraych». Abû Bakr approuva: «C'est bien dit».

À ce moment-là Abû 'Obaydah et 'Omar dirent d'une même voix: «Nous jurons par Allah que nous ne prendrons jamais la préséance sur toi dans cette affaire, car tu as été le meilleur compagnon et l'ami fidèle du Saint Prophète, et personne ne saurait être supérieur à toi à cet égard».

En entendant ces paroles, les Ançâr comprirent qu'ils avaient été mis hors de la course au Califat. Aussi changèrent-ils immédiatement de cap et lancèrent-ils des slogans en faveur du grand absent, le Commandeur des Croyants, l'Imam 'Alî: «'Alî Ibn Abî Tâlib doit être le Calife (successeur) du Saint Prophète».

Ce slogan fit trembler certains dignitaires, car ils savaient pertinemment que si l'Imam 'Ali se libérait des cérémonies funéraires du Saint Prophète et qu'il assistait à la réunion de Saqîfah, tout le monde lui prêterait serment d'allégeance, et il obtiendrait certainement le vote de la majorité.

Pour parer à une telle éventualité, 'Omar se tourna précipitamment vers Abû Bakr et lui dit: «Donne-moi ta main afin que je te prête serment d'allégeance, car tu es l'aîné de la communauté et tu mérites cette position».

Puis sans attendre, il tendit sa main, tint celle d'Abû Bakr, la serra en guise de prestation de serment d'allégeance. Il s'ensuivit que toutes les personnes présentes à l'exception de deux ou trois personnes, prêtèrent serment d'allégeance à Abû Bakr Ibn (fils de) Quhâfah.

C'est de cette façon que le conseil de "l'élection" du Calife conclut sa tâche et que ses membres retournèrent à la ville pour annoncer qu'ils avaient "élu" Abû Bakr, successeur du Saint prophète.

Le seul sujet qui ne fut pas mentionné dans le Conseil, était celui des Ahl-ul-Bayt (les Membres bénis de la Maison (Famille) du Saint Prophète). Le seul nom qui y avait été évoqué le moins, était celui de l'Imam 'Alî, et la seule chose qui n'avait été point discutée, était les recommandations et les affirmations du Saint Prophète relatives à la désignation de l'Imam 'Alî pour sa succession.

Les proches Compagnons du Messager d'Allah, tel Bilâl, Salmân, Abû Tharr, Miqdâd etc. n'avaient pas assisté au conseil, et même s'ils y avaient été, ils en auraient été sûrement rejetés.

Après que la prestation du serment d'allégeance eut été conclue pour Abû Bakr, un groupe des Omayyades, ayant appris le mécontentement de l'Imam 'Alî de ce qui s'était passé, se rendit chez lui, sous la direction d'Abû Sufiyân.

L'objectif que ce groupe et notamment Abû Sufiyân, voulait atteindre par cette visite était double. D'une part, les Omayyades pensaient qu'en soutenant l'Imam 'Alî contre Abû Bakr, ils pouvaient s'assurer de hautes positions dans l'administration califale, si l'Imam 'Alî acceptait leur offre de soutien et qu'il accédait au Califat grâce à ce soutien. Mais ils espéraient surtout se venger des Musulmans - qui les avaient vaincus et humiliés - en provoquant une guerre civile entre les deux principales ailes de la Communauté musulmane: les partisans d'Abû Bakr qui s'était emparé du Califat et les partisans de l'Imam 'Alî, à qui le Califat devait revenir légalement et légitimement.

Ainsi, lorsque Abû Sufiyân s'était réuni avec quelques dignitaires de Quraych, notamment le clan de 'Abdul Muttalib (le Clan du Prophète), il leur avait dit: «O les Banî Abdul-Muttalib! Le Califat est sorti des mains des Banî Hâchim (le Clan du Saint Prophète et de 'Alî) et transféré vers Abû Bakr. Et demain cet homme grossier ('Omar Ibn al-Khattâb) va nous gouverner. Relevez-vous, et allons chez 'Alî. Nous discuterons avec lui et nous lui prêterons, le cas échéant, serment d'allégeance. Après quoi, nous tuerons quiconque s'opposera à nous».

Avec cet objectif en tête, Abû Sufiyân s'était donc rendu chez l'Imam 'Alî en lui disant: «Si tu te soulèves pour recouvrer ton droit (le califat), je ne t'épargnerais aucune assistance dont tu aurais besoin».

L'Imam 'Alî jeta un coup d'oeil significatif sur Abû Sufiyân, montrant qu'il avait deviné l'intention cachée de ce dernier de porter un coup à l'Islam. Aussi déclina-t-il l'offre de soutien et d'assistance et dit-il à Abû Sufiyân et ses compagnons:

«O gens! Déchirez les vagues des dissensions par les bateaux de sauvetage. Eloignez-vous de la voie de l'animosité et enlevez les couronnes de la vantardise de vos têtes. On doit ou bien se soulever avec une aile (amis et partisans), et être alors victorieux, ou bien se résigner (par contrainte ou pour l'intérêt général) et se retirer.

»Obtenir le Califat de la façon que vous suggérez est aussi malsain que l'eau amère. Par conséquent, le soulèvement armé dans ces conditions n'est pas dans mon intérêt, car celui qui cueille un fruit encore vert est semblable à celui qui plante dans la terre d'autrui.

»Si j'évoque mon droit au Califat, on dira que j'ambitionne le pouvoir, et si je reste tranquille, on dira que je crains la mort. Or le fils d'Abû Tâlib se délecte de la mort plus qu'un nourrisson de la mamelle de sa mère. Donc mon silence concernant le Califat n'est nullement dû à la crainte de la mort ni de la défaite. Mais il tient à quelque chose que je connais et qui m'empêche de vouloir le Califat dans les conditions présentes. Et si je vous révélais cette chose que je connais, vous trembleriez et vous vous troubleriez comme une corde au fond d'un puits profond.

»Ainsi, ce à quoi vous m'invitez n'est ni dans mon intérêt ni dans l'intérêt général de l'Islam et des Musulmans. Allez-vous-en».(51)

Alors que Bilâl et des centaines d'autres Musulmans s'étaient rassemblés, les larmes aux yeux, près de la maison du Saint Prophète, oubliant leurs soucis et occupations quotidiennes et plongés dans une tristesse et un hébétement indescriptibles, la nouvelle de la réunion de la Saqîfah et de la désignation d'Abû Bakr à la succession du Messager d'Allah leur fut annoncée.

C'était un grand choc pour Bilâl et pour bien d'autres: «Qu'est-ce que cela veut dire?», se demandèrent-ils incrédules et désagréablement surpris.

«Quel acte fautif et illogique a-t-on a commis, alors que le corps du Saint Prophète n'est pas encore enterré et que les larmes des survivants n'ont pas encore séché! Le Calife du Saint Prophète n'avait-il pas été désigné à Ghadîr Khom, sur ordre d'Allah? Est-il possible qu'un autre que l'Imam 'Alî puisse succéder au Saint Prophète? Les gens n'avaient-ils pas prêté serment d'allégeance à l'Imam 'Alî du vivant et en présence du Saint Prophète à Ghadîr Khom? L'événement de Ghadîr Khom est encore frais et les recommandations du Saint Prophète résonnent toujours dans les oreilles!»

En tout état de cause les procédures de l'accession d'Abû Bakr continuèrent jusqu'à ce qu'il commençât à exercer sa fonction, et toute velléité de protestation contre cette façon anormale et conspiratoire d'accéder au Califat, fut écrasée impitoyablement. Les personnes qui avaient préparé minutieusement leur plan pour s'emparer du Califat, depuis des années, l'exécutèrent tout de suite après le décès du Saint Prophète.

Et ce faisant, ils brisèrent pour toujours l'unité des musulmans. Les malheurs dont souffre la Ummah de nos jours ne sont que quelques-unes des conséquences incalculables de cet acte contraire à la volonté du Saint Prophète et au dessein d'Allah.

Le Clan califal envoya plusieurs représentants, gouverneurs et percepteurs d'impôts aux différents territoires de l'Etat islamique. Ces personnes qui s'étaient préparées depuis longtemps pour cette opportunité, déployèrent tous leurs efforts pour arracher aux gens le serment d'allégeance à leur représentant, et renforcer l'assise du Califat.

De temps en temps des voix s'élevaient en faveur de l'Imam 'Alî, mais étaient rapidement réduites au silence, par la menace, la promesse ou la ruse. Pour empêcher le développement d'un climat d'opposition, on avait créé une situation telle que quiconque osait faire une objection, son nom était noté dans un registre spécial et un dossier était ouvert sur lui, pour le soumettre en permanence à des ennuis et des persécutions.

Les espions et les partisans intéressés du pouvoir suscitèrent un tel climat que toute personne qui se permettait d'évoquer l'usurpation du Califat, se voyait frappée de disgrâce avec toutes les conséquences imaginables que cela entraînait.

Vous n’avez pas le droit de laisser des commentaires